QUATRIÈME PARTIE. DAVID ET ABSALOM.
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I. — DISGRACE ET RETOUR D’ABSALOM.
— Inceste d’Amnon. —
Après cela, il arriva qu’Absalom, fils de David, ayant une sœur qui était belle et qui s’appelait Thamar, Amnon, fils de David, l’aima. Amnon se tourmentait, jusqu’à se rendre malade, au sujet de Thamar, sa sœur ; car elle était vierge, et il semblait impossible à Amnon de lui rien faire. Amnon avait un ami, nommé Jonadab, fils de Sammaa, frère de David, et Jonadab était un homme fort avisé. Il lui dit : « Pourquoi es-tu ainsi défait, fils du roi, chaque matin ? Ne me l’indiqueras-tu pas ? » Amnon lui répondit : « J’aime Thamar, sœur de mon frère Absalom. » Jonadab lui dit : « Mets-toi au lit et fais le malade. Quand ton père viendra te voir, tu lui diras : Permets, je te prie, que Thamar, ma sœur, vienne me donner à manger, et qu’elle prépare le mets sous mes yeux, afin que je le voie, et je mangerai de sa main. » Amnon se coucha et fit le malade. Le roi vint le voir, et Amnon dit au roi : « Je te prie, que Thamar, ma sœur, vienne faire deux gâteaux sous mes yeux, et que je les mange de sa main. »
David envoya dire à Thamar dans la maison : « Va à la maison de ton frère Amnon et prépare-lui un mets. » Thamar alla chez son frère Amnon, qui était couché. Prenant de la pâte, elle la pétrit, la mit en gâteaux sous ses yeux et fit cuire les gâteaux ; elle prit ensuite la poêle et les versa devant lui. Mais il refusa de manger. Amnon dit alors : « Faites sortir d’auprès de moi tout le monde. » Lorsque tous furent sortis d’auprès de lui, 10 Amnon dit à Thamar : « Apporte le mets dans l’alcôve, et que je le mange de ta main. » Thamar prit les gâteaux qu’elle avait faits, et les apporta à son frère Amnon dans l’alcôve. 11 Comme elle les lui présentait à manger, il la saisit et lui dit : « Viens, couche avec moi, ma sœur. » 12 Elle lui répondit : « Non, mon frère, ne me déshonore pas, car on n’agit pas ainsi en Israël ; ne commets pas cette infamie. 13 Moi, où irais-je porter ma honte ? Et toi, tu serais comme l’un des infâmes en Israël. Parles-en au roi, je te prie, et il ne refusera pas de me donner à toi. » 14 Mais il ne voulut pas écouter sa voix ; plus fort qu’elle, il la violenta et coucha avec elle. 15 Aussitôt Amnon eut pour elle une très forte aversion, et la haine dont il la haït fut plus forte que l’amour dont il l’avait aimée ; et Amnon lui dit : « Lève-toi, va-t-en ! » 16 Elle lui répondit : « Au mal que tu m’as fait, n’ajoute pas le mal plus grand encore de me chasser. » Mais, sans vouloir l’écouter, 17 il appela le garçon qui le servait et dit : « Jetez cette femme dehors, loin de moi ; et ferme la porte derrière elle. » 18 Or elle avait une robe longue, car c’était le vêtement que portaient les filles du roi encore vierges. Le serviteur d’Amnon la mit dehors et ferma la porte derrière elle. 19 Thamar prit de la poussière et la mit sur sa tête ; elle déchira la longue robe qu’elle portait et, mettant la main sur sa tête, elle s’en alla en poussant des cris. 20 Absalom, son frère, lui dit : « Ton frère Amnon a-t-il été avec toi ? Maintenant, ma sœur, tais-toi, c’est ton frère ; ne prends pas cette affaire à cœur. » Et Thamar demeura, désolée, dans la maison de son frère Absalom. 21 Lorsque le roi David apprit toutes ces choses, il fut très irrité. (* La Vulgate ajoute : Mais il ne voulut pas contrister l’esprit d’Amnon, son fils, car il l’aimait comme étant son premier né. *) — 22 Absalom n’adressait plus aucune parole, bonne ou mauvaise, à Amnon, car Absalom haïssait Amnon, à cause de l’outrage fait à Thamar, sa sœur.
— Vengeance d’Absalom. —
23 Deux ans après, Absalom avait les tondeurs à Baal-Hasor, près d’Ephraïm, et Absalom invita tous les fils du roi. 24 Absalom alla trouver le roi et dit : « Voici que ton serviteur a les tondeurs ; que le roi et ses domestiques viennent chez ton serviteur. » 25 Et le roi dit à Absalom : « Non, mon fils, nous n’irons pas tous, de peur que nous ne te soyons à charge. » Absalom fit des instances, mais le roi ne voulut pas y aller, et il le bénit. 26 Alors Absalom dit : « Si tu ne viens pas, permets du moins à Amnon, mon frère, de venir avec nous. » Le roi répondit : « Pourquoi irait-il avec toi ? » 27 Absalom ayant insisté, le roi laissa aller avec lui Amnon et tous les fils du roi.
28 Absalom donna cet ordre à ses serviteurs : « Faites attention ! Quand le cœur d’Amnon sera gavé par le vin et que je vous dirai : Frappez Amnon ! vous le tuerez. Ne craignez pas ; n’est-ce pas moi qui vous l’ai commandé ? Soyez fermes et montrez du courage ! » 29 Les serviteurs d’Absalom firent à Amnon comme Absalom l’avait ordonné. Et tous les fils du roi se levant, montèrent chacun sur sa mule et s’enfuirent.
30 Comme ils étaient encore en chemin, ce bruit arriva à David : « Absalom a tué tous les fils du roi, et il n’en est pas resté un seul. » 31 Le roi se leva, déchira ses vêtements et se coucha par terre, et tous ses serviteurs se tenaient là, les vêtements déchirés. 32 Jonadab, fils de Semmaa, frère de David, prit la parole et dit : « Que mon seigneur ne dise pas qu’on a tué tous les jeunes gens, fils du roi ; Amnon seul est mort. C’est une chose qui était sur les lèvres d’Absalom depuis le jour où Amnon a déshonoré Thamar, sa sœur. 33 Et maintenant, que le roi mon seigneur ne s’imagine pas que tous les fils du roi sont morts ; car Amnon seul est mort. » 34 Et Absalom prit la fuite.
Or le jeune homme placé en sentinelle leva les yeux et regarda, et voici qu’une grande troupe venait par la route occidentale, du côté de la montagne. 35 Jonadab dit au roi : « Voici les fils du roi qui arrivent ; les choses se sont passées comme le disait ton serviteur. » 36 Comme il achevait de parler, les fils du roi arrivèrent et, élevant la voix, ils pleurèrent ; le roi aussi et tous ses serviteurs versèrent des larmes abondantes. 37 Mais Absalom s’enfuit et s’en alla chez Tholomaï, fils d’Ammiud, roi de Gessur. Et David faisait le deuil de son fils tous les jours.
38 Absalom s’enfuit et s’en alla à Gessur, et il y fut trois ans. 39 Et le roi David renonça à poursuivre Absalom, car il s’était consolé de la mort d’Amnon.