15
(Mrc 7,1-23; Luc 11,37-41)
Alors des Scribes et des Pharisiens venus de Jérusalem s’approchèrent de Jésus, et lui dirent :
« Pourquoi tes disciples transgressent-ils la tradition des anciens ? Car ils ne se lavent pas les mains lorsqu’ils prennent leur repas. »* Il leur répondit : « Et vous, pourquoi transgressez-vous le commandement de Dieu par votre tradition ? Car Dieu a dit : Honore ton père et ta mère ; et : Quiconque maudira son père ou sa mère, qu’il soit puni de mort. Mais vous, vous dites : Quiconque dit à son père ou à sa mère : Ce dont j’aurais pu vous assister, j’en ait fait offrande, n’a pas besoin d’honorer autrement son père ou sa mère. Et vous mettez ainsi à néant le commandement de Dieu par votre tradition. Hypocrites, Isaïe a bien prophétisé de vous quand il a dit : Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. C’est en vain qu’ils m’honorent, en donnant des préceptes qui ne sont que des commandements venant des hommes. »
10 Puis, ayant fait approcher la foule, il leur dit : « Écoutez et comprenez. 11 Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme ; mais ce qui sort de la bouche, voilà ce qui souille l’homme. »§ 12 Alors ses disciples venant à lui, lui dirent : « Sais-tu que les Pharisiens, en entendant cette parole, se sont scandalisés ? » 13 Il répondit : « Toute plante que n’a pas plantée mon Père céleste, sera arrachée. 14 Laissez-les ; ce sont des aveugles qui conduisent des aveugles. Or, si un aveugle conduit un aveugle, ils tomberont tous deux dans la fosse. » 15 Pierre, prenant la parole, lui dit : « Expliquez-nous cette parabole. » 16 Jésus répondit : « Êtes-vous encore, vous aussi, sans intelligence ? 17 Ne comprenez-vous pas que tout ce qui entre dans la bouche va au ventre, et est rejeté au lieu secret ? 18 Mais ce qui sort de la bouche vient du cœur, et c’est là ce qui souille l’homme. 19 Car c’est du cœur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les paroles injurieuses. 20 Voilà ce qui souille l’homme ; mais manger sans s’être lavé les mains, cela ne souille pas l’homme. »
(Mrc 7,24-30)
21 Jésus étant parti de là, se retira du côté de Tyr et de Sidon.* 22 Et voilà qu’une femme cananéenne, de ce pays-là, sortit en criant à haute voix : « Aie pitié de moi, Seigneur, fils de David ; ma fille est cruellement tourmentée par le démon. » 23 Jésus ne lui répondit pas un mot. Alors ses disciples, s’étant approchés, le prièrent en disant : « Renvoyez-la, car elle nous poursuit de ses cris. » 24 Il répondit : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. » 25 Mais cette femme vint se prosterner devant lui, en disant : « Seigneur, secourez-moi. » 26 Il répondit : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le jeter aux petits chiens. » 27 « Il est vrai, Seigneur, dit-elle ; mais les petits chiens mangent au moins les miettes qui tombent de la table de leur maître. » 28 Alors Jésus lui dit : « Ô femme, ta foi est grande : qu’il te soit fait selon ton désir. » Et sa fille fut guérie à l’heure même.
(Mrc 7,31-37)
29 Jésus quitta ces lieux et vint près de la mer de Galilée. Étant monté sur la montagne, il s’y assit. 30 Et de grandes troupes de gens s’approchèrent de lui, ayant avec eux des boiteux, des aveugles, des sourds-muets§, des estropiés et beaucoup d’autres malades. Ils les mirent à ses pieds, et il les guérit ; 31 de sorte que la multitude était dans l’admiration, en voyant les muets parler, les estropiés guéris, les boiteux marcher, les aveugles voir, et elle glorifiait le Dieu d’Israël.
(14,13-21; Mrc 6,34-44; 8,1-9; Luc 9,10-17; Jn 6,1-14)
32 Cependant Jésus, ayant appelé ses disciples, leur dit : « J’ai compassion de cette foule ; car voilà déjà trois jours qu’ils restent près de moi, et ils n’ont rien à manger. Je ne veux pas les renvoyer à jeun, de peur que les forces ne leur manquent en chemin. »* 33 Les disciples lui dirent : « Où trouver dans un désert assez de pains pour rassasier une si grande foule ? » 34 Jésus leur demanda : « Combien avez-vous de pains ? » « Sept, lui dirent-ils, et quelques petits poissons. »
35 Alors il fit asseoir la foule par terre, 36 prit les sept pains et les poissons, et, ayant rendu grâces, il les rompit et les donna à ses disciples, et ceux-ci au peuple. 37 Tous mangèrent et furent rassasiés, et des morceaux qui restaient, on emporta sept corbeilles pleines. 38 Or le nombre de ceux qui avaient mangé s’élevait à quatre mille, sans compter les femmes et les enfants.
39 Après avoir renvoyé le peuple, Jésus monta dans la barque et vint dans le pays de Magédan.
* 15:2 XV, 2. Marc, vii, 1-13. 15:5 5. Quand un Juif voulait consacrer à Dieu ou au temple une propriété, une somme d’argent, un bien quelconque, il n’avait qu’à prononcer le mot qorban, c’est-à-dire don, offrande, ce bien était dès lors considéré connue appartenant irrévocablement à Dieu ; ni les parents dans le besoin, ni même les créanciers n’y avaient plus aucun droit. Sens des vers. 4-6 : Dieu vous commande d’honorer, et par suite d’assister vos parents. Or, ce précepte divin, vous le détruisez par une tradition absurde qui autorise un fils à répondre à ses parents dans le besoin : « Ce bien qui pourrait vous venir en aide, est qorban, je le voue (ou je l’ai voué) au temple : je suis donc quitte envers vous ; je n’ai pas besoin de vous assister autrement. » Vulgate : Toute offrande que je fais à Dieu te profitera, te viendra suffisamment en aide, etc. ; le sens reste le même. 15:7 7. Isaïe, xxix, 13. § 15:11 11. Marc, vii, 14-25. C’est dans l’homme intérieur qu’il faut chercher la raison de la sainteté ou de la malice. Prise en soi et indépendamment de tout précepte divin, la nourriture est, au point de vue moral, chose indifférente. * 15:21 21. Marc, vii, 24-30. 15:27 26. Notre-Seigneur s’exprime selon la manière de parler des Juifs, qui s’appelaient eux-mêmes enfants de Dieu, et donnaient aux païens, par mépris, le nom de chiens. Ce langage est moins dur qu’il ne paraît d’abord ; cette femme savait bien qu’elle était païenne ; pour le lui dire, Jésus emploie une locution proverbiale souvent en usage alors, et cela d’une voix et d’un visage où il y avait plus de bonté que de reproche, comme la suite le fait voir. 15:29 29. Près de la mer de Galilée : sur la rive orientale, dans la Décapole, Marc, vii, 31. § 15:30 30. Des sourds-muets ; entre autres, celui dont S. Marc raconte, avec détails, la guérison (vii, 32 sv.). * 15:32 32. Marc, viii, 1-10. 15:39 39. La Vulg. met ici Magédan ; le grec varie entre Magadan et Magdala. Cette dernière ville, aujourd’hui pauvre village nommé Medjdel, était la patrie de Marie Madeleine ou de Magdala. Voy. Marc, viii, 10.